On sait depuis les années 1990 qu’au cœur de chaque galaxie est tapi un trou noir géant, des objets à la fois hors normes eu égard à leur masse très élevée (dépassant parfois le milliard de masses solaires) et très mystérieux car leur mode de formation demeure inconnu. Ce qui est bien connu en revanche, ce sont les étranges structures qu’ils sont capables de produire bien au-delà des limites des galaxies qui les hébergent.

Si ces trous noirs ont pu acquérir une masse aussi considérable, c’est qu’ils ont été alimentés par d’immenses quantités de gaz, très abondant dans les régions centrales des galaxies. Alors que celui-ci tombe en spiralant vers le trou noir, il s’échauffe fortement au point d’émettre un intense rayonnement parfois visible à des milliards d’années-lumière. Pour la matière, il s’agit cependant du chant du cygne : une fois absorbée par le trou noir, la lumière qu’elle pourrait émettre sera emprisonnée à jamais.

Mais une faible fraction de cette matière connaît une issue plus heureuse. Les mouvements du gaz chutant vers le trou noir produisent un fort champ magnétique qui peut canaliser une partie de celui-ci et lui permettre d’échapper à la terrible emprise du trou noir en s’évadant le long de deux jets diamétralement opposés. Miraculeusement expulsé à des dizaines, voire des centaines de milliers de kilomètres par seconde, ce gaz finit peu à peu par être freiné par le milieu intergalactique et se répartit alors dans deux immenses et majestueux lobes de plusieurs dizaines de milliers d’années-lumière que les radiotélescopes arrivent à capter sans peine, conférant à certaines galaxies… une étrange forme d’haltère.

À gauche : Cygnus A imagée en ondes radio. À droite : la galaxie Hercules A imagée en lumière visible et ondes radios (en rose).

Crédit : Very Large Array ; NASA, ESA, S. Baum & C. O'Dea (RIT), R. Perley & W. Cotton (NRAO/AUI/NSF), Hubble Heritage Team (STScI/AURA