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La tête dans les étoiles - Épisode 61 : Le jour où le ciel nous est vraiment tombé sur la tête

29/10/2021

De célèbres et irréductibles gaulois de bande dessinée en avaient, dit-on, très peur, et on sait désormais que la disparition des dinosaures leur donnait raison.

De quoi parle-t-on ici ? De la possibilité que le ciel nous tombe sur la tête, c’est-à-dire qu’une météorite heurtant la Terre à grande vitesse ou se désintégrant dans l’atmosphère cause une grande dévastation, à l’échelle régionale ou mondiale en fonction de sa taille. Il y a 66 millions d’années, un astéroïde d’une grosse dizaine de kilomètres heurta notre planète quelque part dans le sud de l’actuel Mexique, causant une extinction massive d’espèces dont les plus emblématiques sont donc les dinosaures, mais de nombreuses autres survécurent parmi lesquelles les ancêtres des mammifères actuels. Un effroyable cataclysme, qui en somme nous fut fort bénéfique. Mais à l’issue, des êtres humains ont-ils eux-mêmes été victimes du feu du ciel ?

 

C’est la réponse positive à cette question qu’une équipe américaine d’astronomes, d’archéologues et de médecins légistes pense avoir trouvé non loin des rives de la Mer Morte. Y ont été exhumées les ruines de la ville de Tall el-Hammam qui portent tous les stigmates d’une dévastation aussi soudaine que massive qui aurait eu lieu vers l’an –1650 : une omniprésente couche de cendres, des squelettes désarticulés comme lors d’une violente explosion, d’autres réduits à d’innombrables fragments, des os rougis par une chaleur très intense, des constructions de plusieurs étages presque entièrement arasées, des poteries cassées dont les débris sont toujours alignés dans une même direction, des briques partiellement fondues, et surtout la preuve décisive d’un événement météoritique : des quartz choqués, c’est-à-dire que leurs grains sont traversés de divers motifs de fracture qu’on trouve systématiquement sur les sites d’impact météoritiques, qui ont été parcourues par une onde de choc dévastatrice.

 

Autre preuve indirecte mais révélatrice : la salinité du sol au niveau de la couche de cendres est considérablement plus élevée que dans les couches géologiques antérieures, signe qu’un événement soudain et concomitant a apporté des quantités gigantesques de sel, comme ce serait le cas lors d’un impact ou de l’explosion dans l’atmosphère d’un bolide qui aurait eu lieu proche de, voire dans la Mer Morte, située une petite vingtaine de kilomètres au sud-ouest, c’est-à-dire à l’opposé de la direction des débris des poteries retrouvées. Ainsi, non seulement la ville de Tall el-Hammam a été rasée, mais l’apport de sel qui a accompagné l’apocalypse a rendu stérile, et pour longtemps, la région environnante comme en témoigne la quasi-absence d’occupation humaine, déjà documentée, dans les siècles qui ont suivi l’an –1650, une bizarrerie restée incomprise car la vallée du Jourdain où était située la ville était jusque-là, et de loin, la plus fertile des régions environnantes.

 

Tient-on l’origine du récit biblique de la destruction de Sodome et Gomorrhe ? Ce sera aux historiens et théologiens d’y réfléchir, mais l’hypothèse est séduisante tant il est facile d’imaginer que la destruction violente de la cité et de ses environs, puis la longue période d’inhabilité qui s’en est suivie, se soit longtemps perpétuée par tradition orale, au point, bien des siècles plus tard, d’avoir été consignée par écrit, fût-ce de façon (très) romancée. Une chose est sûre cependant : le probable événement cosmique ayant signé la fin de la ville de Tall el-Hammam ne doit rien à une punition divine, mais à une simple quoique inhumaine facétie de la mécanique céleste qui amena un bolide de plusieurs dizaines de mètres à l’aplomb d’une zone habitée il y a près de 3 700 ans.